Archives mensuelles : mai 2013

Plurilinguisme : du handicap à la supériorité?

Les prises de position par rapport au plurilinguisme (incluant le bilinguisme) se font souvent – et façon tout aussi véhémente – soit (minoritairement) dans le sens de l’opposition soit (majoritairement) dans celui de la valorisation. Comme si monolinguisme et plurilinguisme étaient porteurs de valeurs fondamentalement opposées.

Ainsi voit-on fleurir les écrits et les discours qui vantent les avantages multiples du plurilinguisme et laissent dans l’ombre de l’implicite le handicap que constituerait le monolinguisme. Ce qui a pour  effet de susciter l’irritation de ceux qui, locuteurs ou chercheurs – soient se percevant plutôt comme monolingues (mais pas, pour autant, handicapés), soient ne partageant pas certains enthousiasmes en faveur du plurilinguisme – prennent décidément position contre ces discours apologétiques.

Il importe de sortir de cette dichotomie et d’envisager la question différemment, de façon beaucoup plus nuancée. Mais pour ce faire, il faut se dépouiller de certaines fausses certitudes et a-priori.

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Et pourquoi pas les langues régionales?

Le psycholinguiste Daniel Gaonac’h a donné comme titre au paragraphe que j’ai cité dans mon  post précédent : Le breton pour tous?

Mais il confesse :

Une première version de ce paragraphe était intitulée « Mais pourquoi donc l’anglais? »

Quelle est donc sa proposition alternative?

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L’anglais à l’école élémentaire

A un moment où le débat fait rage en France autour de la question de l’anglais comme vecteur d’enseignement dans les établissements d’enseignement supérieur (par rapport auquel j’ai déjà pris position ici même), je suis tombée, au cours d’une lecture, sur un passage fort intéressant qui peut fournir de solides arguments psycholinguistiques en faveur d’un report de l’étude de l’anglais au-delà de l’école primaire.

Je soumets volontiers la citation ci-dessous à la réflexion de qui voudra. Surtout à l’intention des Pays qui seraient tentés par le « tout-anglais » et tout particulièrement de ceux, dont le mien, l’Italie, qui ont déjà succombé à la tentation du choix du seul anglais introduit précocement à l’école élémentaire. Parce que « non è mai troppo tardi » pour revenir sur les erreurs faites …

Les linguistes s’accordent  […] à considérer que l’anglais est une langue très difficile, et que rien (sinon son poids économique) ne peut justifier qu’on en fasse la langue privilégiée pour un enseignement précoce. Le psycholinguiste sait de plus que l’anglais est une langue particulièrement confuse pour ce qui concerne la correspondance grapho-phonologique :

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Connaître les Roms pour ne pas les craindre

C’est le plus souvent l’inconnu ou le non familier qui nous fait peur: le vide de connaissance est alors tout de suite rempli par les lieux communs, les stéréotypes, les ouï-dire, les faits divers érigés en preuves ontologiques. Et ce d’autant plus quand ces attitudes trouvent confirmation dans les propos discriminatoires, voire franchement racistes des plus hautes charges d’un État ou encore dans les mesures contestables qu’elles adoptent …

Il importe alors de combler le vide de notre ignorance par des informations. De mobiliser nos représentations figées, de suspendre nos jugements à l’emporte-pièce. D’essayer simplement de comprendre. Pour commencer.

Sans velléité d’exhaustivité, voici quelques premières, simples pistes à suivre.

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Langues régionales/minoritaires dans l’éducation bi-/plurilingue

C’est le titre d’une publication, dont le sous-titre est Langues d’ici, langues d’ailleurs, issu du projet Éducation bi-/plurilingue, langues minoritaires, langues collatérales. Intercompréhension et compétences interlinguistiques (EBP-ICI) faisant partie du programme 2008-2011 du CELV, projet coordonné par Claude Cortier, avec ma collaboration.

Ces jours-ci, la version définitive en langue française a été mise en ligne et est maintenant téléchargeable.

Cette publication entend donner quelques réponses concrètes aux questions suivantes: comment prendre en compte les répertoires des élèves quand ils se composent (aussi) de langues régionales ou minoritaires ? Comment d’abord accueillir et valoriser ces langues et leurs locuteurs? Comment prendre appui sur elles pour une meilleure acquisition des langues à l’école et pour le développement des compétences plurilingues et interculturelles des élèves ? Quelles activités mettre en œuvre en classe pour exploiter éventuellement les liens de parentés existant entre ces langues et la / les langue/s de scolarisation ou d’autres langues encore?

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L’anglais et l’université

… ou la question des langues dans ses rapports au savoir et à son élaboration …

Fort émoi ces jours-ci en France à cause du projet de loi sur l’enseignement supérieur qui sera défendu par la ministre Geneviève Fioraso à partir du 22 mai. Son article 2 prévoit quelques exceptions au principe selon lequel « la langue de l’enseignement, des examens et concours, ainsi que des thèses et mémoires dans les établissements publics et privés d’enseignement est le français » (loi Toubon de 1994). D’après cet article 2, les universités françaises pourraient assurer des enseignements dans une langue étrangère, en anglais notamment.

Fort émoi, dans un passé récent (2012), quand une question similaire a agité l’opinion publique italienne.

Sans intention aucune d’entrer dans le débat français, il importe, je crois, de prendre position.

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Enseigner l’histoire en deux langues

Est-ce que l’enseignement bilingue doit viser avant tout une meilleure maîtrise de deux langues ? Est-ce que la discipline doit se limiter à offrir un domaine  d’acquisition langagière plus vaste que la seule classe de langue ? Que peut apporter à une discipline scolaire l’emploi de deux langues ? Devrait-il y avoir un apport réciproque entre les langues et la discipline? Et dans ce cas, en quoi consiste-t-il ?

Le prétexte a cette réflexion m’a été offert par l’écoute récente du podcast d’une assez ancienne émission radiophonique de Tout un monde (sur France Culture) dont le titre est Des histoires nationales aux histoires partagées: travaux en cours… (émission du 21 janvier 2013, qu’il est encore possible d’écouter).

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Glossaires pour la recherche en didactique des langues et des cultures

Ils sont toujours utiles quand le doute nous assaille par rapport aux notions et aux concepts que nous utilisons et à l’évolution de leurs définitions.

J’en présenterai deux.

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Coming out linguistique

Tôt ou tard il aurait fallu le faire. Mieux vaut tôt, sans doute.

L’urgence de cette « sortie du placard » m’est apparue quand c’est une copine des temps du lycée, de sa profession psychologue (ou « strizzacervelli », selon une expression italienne que j’aime bien), qui m’a demandé : « Perché mai scrivi il tuo blog in italiano? Sei italiana, tu!! ».

Fait avéré, un bilingue est toujours appelé à justifier le choix d’une langue de son répertoire. Pourquoi donc, dans quelles circonstances, dans quels domaines et avec qui se sert-il d’une langue – plutôt que d’une autre – pour s’exprimer?

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1er mai

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En ce 1er mai 2013, fête des travailleurs, comment ne pas penser, avec solidarité et souci et empathie, à tant de chômeurs et de chômeuses qui, à travers toute l’Europe, souffrent de la perte de leur travail; à tant de jeunes qui, d’emploi intérimaire en emploi intérimaire, vivent dans l’angoisse de perdre le leur; à tant de femmes que cette crise pénalise; à celles et ceux qui, tout en travaillant, sont dans la crainte de la perte de leur emploi; à celles et ceux qui ont définitivement perdu tout espoir d’en (re)trouver un jour un; à celles et ceux qui sont obligés pour survivre d’accepter n’importe quelles conditions de travail; à celles et ceux qui sont désormais obligés de survivre nous imaginons avec peine dans quelles conditions …

Comment ne pas leur dire notre honte, notre sentiment d’impuissance et notre envie d’action positive en leur secours?